Les premiers pas sont déterminants. (Septembre 2012)
Le président de la République, M. Joseph Martelly s’est entortillé davantage dans les mailles de l’inconstitutionnalité avec la formation du nouveau Conseil Électoral Permanent, issu d’un processus entaché de mille et une irrégularités. Paradoxalement, ce sont ceux et celles qui sont dotés de la responsabilité de faire les lois et de les faire respecter qui s’obstinent à creuser et à lui préparer le chemin tortueux de l’illégalité. Hier, il revenait à des parlementaires peu soucieux de la bonne marche du pays d’amender dans l’obscurité la plus épaisse la Constitution de 1987.
Au cours des premières semaines de son quinquennat, le président Martelly avait rejeté l’amendement proposé qui, d’après ses premières analyses, est truffé de fraudes et d’erreurs. Il y a même soupçonné un piège qui lui serait tendu. Malgré cela, il a promulgué le même amendement plus d’un an après sans autre forme de procès. Aujourd’hui, c’est le nouveau président de la Cour de Cassation, la plus haute instance judiciaire du pays et président constitutionnel du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire le CSPJ, Me Anel Alexis, qui a accompagné le chef de l’État dans ce forfait. Cet allié fidèle du président de la République a profité de l’absence de trois membres sur huit- le neuvième se trouvait à l’étranger- de cette instance tout récemment nommée pour choisir de son propre chef les trois personnes devant siéger, au nom du pouvoir judiciaire, au Conseil Électoral Permanent. Me. Alexis ne s’est pas même embarrassé du principe de la majorité absolue requis pour faire sa nomination alors qu’il n’a pas droit de vote. Le ver est déjà dans l’amendement de la Loi-mère et de sa promulgation.
En effet, le nouvel amendement a enlevé aux Collectivités territoriales certaines de ses prérogatives démocratiques. Elles ne peuvent plus participer à la constitution du Conseil Electoral Permanent dont la responsabilité incombe désormais exclusivement aux trois grands pouvoirs traditionnels, en l’occurrence, les pouvoirs législatif, judiciaire et exécutif. Chacun d’eux a droit à trois représentants. Excipant de sa bonne foi pour mettre fin aux sempiternels Conseils Électoraux Provisoires- le pays en a connu une quinzaine au cours de plus d’une vingtaine d’années- le président Martelly s’est empêtré dans l’illégalité la plus fragrante en publiant la liste des six membres du nouveau Conseil, soit ceux de l’exécutif et ceux, malgré le tollé qu’a provoqué la brutale méthode de Me. Alexis, du Conseil Supérieur du Pouvoir Judicaire.
Il a fait fi de la proportion réservée à l’assemblée nationale des parlementaires. Il a hiérarchisé les pouvoirs dans la lignée du présidentialisme fort de tous les régimes haïtiens précédents en s’accorant la part du lion. Les mailles de l’inconstitutionnalité sont devenues tellement serrées que tous les pas du président Joseph Martelly le conduisent vers le même précipice. Il sera très difficile à son pouvoir de s’en sortir.
Le président Martelly subit les conséquences de son calcul erroné.
Existerait-il une voie légale pour contourner la résistance d’une fraction importante du sénat qui refuse jusqu’à présent tout compromis dans le dossier de la formation du Conseil Électoral Permanent ? La Chambre haute est amputée d’un tiers de ses membres, arrivé à la fin de leur mandat depuis quelque trois mois. Le président Martelly subit les conséquences négatives de son calcul erroné de n’avoir pas organisé les élections pour le tiers du Sénat et les Collectivités territoriales durant le mois de novembre de l’année dernière suivant le délai fixé par la Constitution.
Ainsi, comme la vie est mouvement, la minorité du début s’est transformée en une majorité imposante et opposante. Celle-ci refuse pour des raisons diverses, soit d’ordre idéologique pour certains ou d’ordre politique ou simplement personnel pour d’autres, de collaborer au choix des trois personnalités que la Charte fondamentale ou l’amendement, son fils bâtard, octroie à l’assemblée nationale. Le président s’enfonce dans l’illégalité quand de son propre chef, il autorise le fonctionnement d’un Conseil Électoral Permanent de six membres au lieu des neuf constitutionnellement prévus. Sur certaines pressions, d’après plus d’un, venant de ses conseillers internes et de quelques courants de ladite communauté internationale, il a ainsi franchi le rubicond.
Suit-il un plan que son équipe et lui se sont tracé ? Navigue-t-il à vue pour arriver à des fins qu’il s’est proposées ? Le cours des évènements nous donnera la réponse.