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Ladite communauté internationale et le pouvoir haïtien (novembre 2012)

La lutte politique a pris ces jours-ci un nouveau tournant dont les principaux acteurs apparaissent clairement identifiés. C’est ladite communauté internationale et une fraction importante du restant des vingt sénateurs encore en fonction. La Constitution exige pour nommer ses trois représentants au Conseil Électoral Permanent la présence en assemblée nationale des deux tiers des députés et des sénateurs alors que la Chambre haute depuis le mois d’avril dernier en est sevrée d’un tiers des leurs. Arithmétiquement, le choix, si l’on veut rester à l’intérieur de la Constitution amendée, s’avère impossible. Plus d’un s’appuie sur cette base pour évoquer la nécessité d’une ultime fois d’un Conseil Électoral Provisoire pour organiser de nouvelles élections afin de renflouer le Sénat et de renouveler les Collectivités territoriales dont le mandat des membres est arrivé à terme depuis plusieurs mois. Pourtant, sans se faire aucun scrupule de leur fonction, des diplomates accrédités au pays exigent haut et fort la formation d’un Conseil Électoral permanent.

Les multiples démarches que ces diplomates ont entreprises auprès du secteur des droits humains, auprès de quelques sénateurs qui militent dans l’opposition au pouvoir, leurs déclarations inopportunes dans les médias au mépris des conventions internationales relatives au respect de la souveraineté des pays tiers, ont démontré sans ambages la position des puissances impérialistes. Celles-ci ont déclaré haut et fort qu’elles ne financeront que des élections préparées par un Conseil Électoral Permanent. On peut se demander ce qu’elles concoctent pour Haïti en dépit de l’impossibilité évidente d’une telle formation toutes les fois qu’elles croient elles-mêmes en la construction d’un État de droit en Haïti. Le 15 octobre de ce mois, le Conseil de sécurité des Nations unies a réitéré pour une nouvelle fois le mandat de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti. Voilà un rituel qui tend à se transformer en une coutume malgré l’impopularité grandissante de cette force d’occupation dans presque toutes les classes sociales. Même le président Martelly lors de sa campagne électorale n’avait pas caché son aversion contre elle. Le représentant de M. Ban King Moun, M. Fernandez, a sans sourciller déclaré que la présence de cet appendice insupportable dans notre corps national est là pour quelques années encore. À partir de 2016, elle se transformera, dit-il, en une mission politique. La grande majorité du pays ignore jusqu’à présent le sens d’une telle déclaration. Est-ce cette volonté de concrétiser le rêve du professeur français Marcel Dans qu’Haïti est devenue « ’ une entité chaotique et ingouvernable »’, une thèse que beaucoup d’autres de divers univers géographiques et intellectuels qui ignorent l’histoire du peuple haïtien ont allègrement reprise?

Marcel Dans, du haut de sa chair professorale, a drapé le pays de l’épithète »’ chaotique et ingouvernable »’. Il appert que c’est dans la perspective de maintenir ce chaos permanent que tous ces bailleurs de fonds encouragent la lutte entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Entre temps, elles s’organisent sous des formes multiples pour piller les richesses naturelles du pays et exploiter sa main d’œuvre en la catégorisant de leur propre chef de main-d’œuvre à bon marché.

Les puissances impérialistes internationales pour mater la résistance rebelle des masses populaires haïtiennes face à toutes leurs tentatives de les subjuguer malgré la complicité malfaisante des politiciens traditionnels et de l’oligarchie expérimentent de nouvelles tactiques pour retarder l’évolution socio-économique ou du moins pour subsumer cette dernière dans leur cadre politique et idéologique. Elles espèrent en empruntant ce chemin mettre en coupe réglée tous les pouvoirs qui accepteraient de faire leur jeu. Car, à l’exception de la première occupation américaine de 1915, jamais la présence internationale ne s’est manifestée avec autant d’arrogance en Haïti.


Marc-Arthur Fils- Aimé

Directeur général de l’ICKL

23 octobre 2012