L’occupation étrangère démasquée (octobre 2011)
La présence des troupes étrangères sur le sol haïtien n’est pas unanimement appréciée de la même façon. D’aucuns, surtout pour cacher leurs intérêts mesquins et immédiats, se montraient sceptiques de la nouvelle occupation du pays. D’autres poussaient leur égoïsme encore plus loin en niant même ce fait. Pourtant, la Mission des Nations-Unies pour la Stabilisation d’Haïti (MINUSTAH) n’est que la pointe visible de ce piétinement de la souveraineté nationale. Plusieurs faits sont venus aujourd’hui corroborer cette évidence.
En effet, toutes les forces militaires expéditionnaires qui occupent un pays ne sont pas seulement des représentantes physiques du pays dont elles sont originaires. Elles sont toujours porteuses d’une idéologie, d’une idéologie réactionnaire empreinte de mépris pour le peuple occupé. Le mauvais comportement des troupes américaines en 1915 a soulevé l’indignation des patriotes haïtiens dont Charlemagne Péralte et Benoît Batraville symbolisent les cas les plus emblématiques. A leur départ en 1934, les yankees ont emporté avec eux tout leur matériel de guerre, mais jusqu’à présent, leur présence est solidement inscrite dans le cerveau de la plupart des membres de nos classes dominantes. La MINUSTAH malgré que nous soyons dans un temps plus moderne, n’a pas dérogé à cette règle cardinale qui caractérise toute force d’occupation.
Aujourd’hui, les horreurs causées par cette dernière ont sauté aux yeux de toutes et de tous. La MINUSTAH n’est pas seulement responsable de l’introduction du choléra dans le pays. On a déjà dénombré depuis son débarquement en juin 2004, une quantité inquiétante de crimes qu’elle a commis, entre autres, sur des jeunes des deux sexes. Leurs dossiers fourmillent de plusieurs actes d’assassinats dont celui du jeune Gérald Jean-Gilles, pendu au Cap-Haïtien au cours du mois d’août 2010, par des soldats népalais qui l‘ont accusé faussement d’un vol d’une centaine de dollars américains. Les croisés contre l’impunité qui se régalent de l’impunité! Les images du viol par des soldats uruguayens sur le jeune haïtien n’ont pas laissé cette fois-ci indifférentes les autorités sud- américaines. Au moins dans l’optique de protéger la renommée de leur armée et aussi de redorer plus ou moins celle de l’ONU assez affectée en Haïti, elles ont pris des mesures disciplinaires contre les soldats fautifs.
L’occupation n’est pas seulement militaire.
L’on se tromperait grandement si on focalisait toute son attention sur le dernier acte délictueux perpétré par des soldats uruguayens à Port-salut, une petite communauté du Sud du pays. L’occupation s’avère plus profonde puisqu’en fait c’est ladite communauté internationale qui dirige le pays par l’entremise de dirigeants haïtiens soumis. Le choix du premier ministre, Garry Conille, un inconnu de la scène politique nationale le démontre bien. C’est quelqu’un qui ne répond pas au prescrit de la Constitution pour occuper un tel poste de chef de gouvernement. Pourtant, sa connivence avec l’ancien président Clinton se veut le principal critère de son acceptation par la Chambre des députés qui l’a acclamé sans aucune réserve par 89 voix sur 89. On s’attend, à moins de grand changement dans l’actuelle mouvance politique, à ce que M. Conille passe le cap du Sénat cependant avec quelques abstentions et votes négatifs.
La lutte contre la MINUSTAH a atteint un certain élan au niveau national et aussi chez les Haïtiennes et les Haïtiens vivants à l’étranger. Le soulèvement est devenu quasi général. Qu’elle s’en aille tout simplement ou qu’elle s’en aille d’après un calendrier préparé et progressif, voilà les deux mots d’ordre véhiculés par une large portion de la population. Cependant, si l’on ne voit que la partie de l’iceberg sans toucher aux causes systémiques qui ont conduit le pays à toutes ces occupations consécutives, l’on connaîtra bientôt la même situation avec des déceptions plus amères dans un futur proche.