Haïti: 21 février, marche contre l‘impunité et le révisionnisme
Le jeudi 21 février, à 10 heures, la Cour d’appel de Port-au-Prince poursuivra son audience de l’affaire Jean-Claude Duvalier. L’ex Président à vie, qui s’était soustrait à la séance du 7 février, est à nouveau sommé de comparaitre en personne.
Les questions suivantes restent et demeurent posées et appellent la même vigilance:
- La justice haïtienne acceptera-t-elle que Duvalier ignore impunément son injonction?
- S’attachera-t-elle aux erreurs de droit et de faits qui caractérisent l’ordonnance du 27 janvier 2012?
En dépit de l’ambiance délétère de l’audience du 7 février, et malgré l’étrange attitude du Ministère public ─ réputé défenseur de la société, mais abondant systématiquement dans le même sens que le conseil de la défense de Duvalier─ les avocats de la partie civile ont obtenu:
- La qualification de Duvalier pour ce qu’il est par (le ?) devant le tribunal: un inculpé.
- La reconnaissance du statut de partie civile pour les personnes, de toutes conditions, qui ont porté plaintes contre Duvalier pour crimes contre l’humanité (arrestations et détentions illégales et arbitraires, tortures, traitements cruels, meurtres, exécutions sommaires, disparitions et déportations forcées, actes inhumains et dégradants, etc.).
- Le maintient de l’exigence de comparution en personne de Duvalier.
A cette audience du 7 février, outre les membres du Collectif, il y avait divers observateurs et observatrices: l’Office de la protection du citoyen (OPC), des organisations haïtiennes de défense des droits humains, les ambassades du Canada, de la France et des États-Unis, l’Organisations des États américains (OÉA), la section droits humains de la Minustah, Avocats sans frontières Canada (ASFC). Duvalier, absent, avait adressé au tribunal une lettre datée du 31 janvier 2013. Les motifs de son absence se résument comme suit:
- La demande de comparution est prématurée.
- Les juges de la Cour d’appel, dans leur rôle d’instruction, «n’ont rien à voir […] avec la recherche de la vérité» […] Car le juge d’instruction est juge des indices et non celui des preuves.»
- La «perception politique» de la date retenue, qui rappelle le 7 février 1986 où «les plus graves crimes politiques ont été commis dans ce pays». Les passions risquent d’être «réveillées et actualisées […] en cette période difficile où le chef de l’État et les dirigeants politiques actuels parlent avec raison de la Réconciliation nationale nécessaire […]. Victimes et bourreaux se donneront obligatoirement rendez-vous ce jour-là, à tort ou à raison. »
Des partisans de Duvalier étaient effectivement massés devant le tribunal; munis du drapeau duvaliériste rouge et noir et de matériels de propagande à la gloire des Duvalier et de leur structure politique actuelle, le Parti de l’unité nationale (PUN). Les «menaces à l’ordre social» annoncées dans la lettre de Duvalier n’ont pas eu lieu. Un autre groupe réclamant le jugement de l’ex dictateur, notamment composé d’étudiants et d’étudiantes, n’a pas cédé à la provocation.
Le Collectif réitère son appel à la solidarité. Solidarité pour contrer l’impunité. Solidarité pour dire Non au révisionnisme qui tente de banaliser des crimes d’État et de réhabiliter un dictateur, en prenant prétexte des turpitudes d’une Haïti tragiquement plombée par l’héritage du système duvaliériste.